C’est toujours un peu l’excitation une soirée de première, à la fois auprès du public, constitué d’une bonne partie de guest-stars, sans oublier nos simples et honnêtes spectateurs, qui ont payé leurs places (« eh oui, ma bonne dame! »); mais également en coulisses, auprès de la troupe et de son chef d’orchestre, Edouard Baer. Tous sont là, prêts à bondir sur scène. Les trois coups sont frappés. La salle du Marigny est pleine à craquer. Le rideau se lève!…


Et nous voici plongés dans un délicieux imbroglio de scènes où l’écriture jubilatoire d’Edouard Baer pétille. Avec son sens inégalé de l’impro, du comique, de l’absurde, de cet humour bonhomme, incisif mais jamais méchant, Edouard Baer joue au Monsieur Loyal et anime cet univers drôlatique autour du thème de « la bonne bouffe ».

Que savons-nous, au fond, de ce qui se passe dans nos assiettes? Comment un gentil petit cochon (le charmant Papinou) va se transformer en un appétissant saucisson? Et ces grandes carottes, d’où viennent-elles vraiment ?

Dans ce restaurant « improvisé », Edouard Baer invite des comédiens hauts en couleurs. Il y a parmi eux les fidèles (Léa Drucker, Atmen Kelif, Philippe Duquesne) et les petits nouveaux (Laura Sillanpââ, Alka Balbir, Jean-Philippe Heurtaut). Autre invitée de cette soirée, notre bonne vieille crise! C’est à cause d’elle que « ce théâtre sans spectateurs » (un comble ce soir-là, dans notre salle comblée!) se transforme en restaurant branché, en un claquement de doigts.

Une improvisation « aux petits oignons »

Alors que le précédent spectacle d’Edouard Baer, Looking for Mr Castang, nous entraînait dans un tourbillon de lieux, d’univers théâtraux et de rencontres cocasses, Miam Miam propose une intrigue plus recentrée. Déjà géographiquement, puisque tout va se passer dans ce restaurant d’un soir.

Ce qui n’empêche pas, côté décors et costumes, de composer un défilé permanent de scènes fantaisistes, poétiques et décalées où l’on aime à reconnaître les comédiens se travestissant dans des personnages caricaturaux à souhait (la vieille fille, le couple qui a tout pour être heureux, le brave paysan, « Pat », cet artiste inénarrable)…

Dans cette intrigue recentrée, on constate une écriture de l’improvisation « aux petits oignons ». Car les nombreuses interventions de Baer, rythment cette situation dramatique tourbillonnante (litote), mais constituent en eux-mêmes des sortes de « one-man show » dans le show, avec ce plaisir de jouer avec la situation, les mots et la complicité du public, qui font depuis toujours la signature d’Edouard Baer.

Tous les ingrédients inquiétants (le spectre de la crise, de la mafia) sont ici détournés au profit d’un univers déjanté, féérique (laissant place à des moments chantés) et enfantin (dans son sens le plus noble). Ainsi, ce nouveau spectacle est plus accessible que jamais et ravira nos charmantes têtes blondes comme nos vénérées têtes blanches, nostalgiques d’un spectacle de divertissement « à la bonne franquette »…

« A taaaablee ! C’est prêêêêêt! »…

Miam Miam
Théâtre Marigny
Jusqu’ en mars 2010
Loc: 0 892 222 333