Trente-cinq ans après la mythique troupe du Splendid, c’est une autre troupe, tout aussi mythique qui s’empare de la pièce Le Père Noël est une ordure. On ne peut plus légitime pour ce genre d’événement, La Troupe à Palmade fait le show actuellement au Théâtre Tristan Bernard, portée par des comédiens délirants à souhait.

Je pense que si je vous rappelle le pitch de départ de la pièce, seul un « ermite des collines » ayant vécu ainsi plus de 35 ans, éloigné de toute civilisation, m’en saura gré. En effet, cette pièce, co-écrite et jouée par la Troupe du Splendid dans le début des années 80, est culte,  et dont un film également culte s’inspirera. Bref, tout le monde connaît l’histoire de cette veille de noël un brin chaotique au sein du bureau d’accueil de SOS Détresse Amitié où Pierre et Thérèse officient.

C’est Pierre Palmade qui signe ici la mise en scène. Son sens du comique dans le moindre détail fait mouche. Il sait souligner la férocité et l’absurdité des scènes et répliques-cultes de la pièce. C’est par ailleurs un peu une expérience de théâtre en soi que de voir cette nouvelle version du Père Noël. En effet, le public autant que les comédiens, connaît le texte par cœur et on n’est pas loin ici  de la communion religieuse autour de ce texte résolument moderne.

Palmade au service de cette écriture décapante

Les comédiens semblent avoir pris le parti de rester fidèles au jeu et au rythme comique de leurs prédécesseurs. Par exemple, le comédien qui interprète l’infâme Pierre Mortez (incarné à l’origine par Thierry Lhermitte), semble comme un skieur de fond émérite suivre parfaitement les traces indiquées (rythme, intonations, accent, tics de langage soulignés) par le comédien d’origine. Pourtant dans ce cadre-même de comédie au cordeau, il semble toutefois très vite s’en affranchir et y imposer son propre style.

Le personnage de Félix (auparavant interprété par Gérard Jugnot) est ici interprété avec beaucoup de justesse par Nicolas Lumbreras. Traduisez ici : on est pliés de rires.

Ce qui marche donc particulièrement bien dans ce Père Noël, c’est à la fois cette façon assez classique et précise de mettre en scène ce texte (ce qui permet aussi de mieux l’écouter) et de rendre hommage à sa première version (on notera également ici les décors qui restent agencés de la même façon qu’à l’époque du Splendid) ; mais aussi l’extrême vitalité et justesse de jeu des comédiens qui incarnent leurs personnages complètement déjantés et caricaturaux avec un réel naturel et sens du comique à la seconde près. Le plaisir des comédiens est également palpable.

Un travail d’orfèvre qui souligne une fois de plus l’écriture totalement décapante de la pièce qui n’a décidément pas pris une ride depuis 35 ans…