Entretien avec Wissam Hojeij, compositeur de la musique de Ceuta, douce prison
Wissam Hojeij a composé la musique du documentaire Ceuta, douce prison réalisé par ses amis Jonathan Millet et Loïc H. Rechi. Après une formation de dix ans au Conservatoire national de guitare classique et solfège, il est guitariste, claviériste et chanteur dans des groupes pop-rock mais aussi assistant- commissaire d’expositions dédiées à la musique. Depuis 2009, il compose des musiques pour le cinéma mais également pour la publicité. Entretien.
Depuis quand travaillez-vous sur la musique de films et pourquoi ce genre de musique-là ?
Ma première musique de film s’est faite justement avec Jonathan Millet il y a quelques 7 ans de cela. Il revenait d’un grand voyage de par le monde et j’ai alors composé des morceaux avec mon groupe de l’époque sur les images qu’il a recueillies au cours de son périple. La connexion artistique s’est tout de suite faite.
Depuis on ne cesse d’échanger avec passion sur le rapport musique / image et on travaille ensemble sur nombre de ses films.
La musique à l’image me captive car elle permet d’explorer des registres de composition variés et d’expérimenter dans des couleurs et styles différents à chaque occasion. Elle convient en cela à ma personnalité musicale éclectique. Par ailleurs je trouve les contraintes amenées par les films stimulantes en termes de créativité. Et enfin ça touche au cinéma qui est l’un de mes grands centres d’intérêt.
Etes-vous venu à Ceuta avant de composer ou vous êtes-vous simplement inspiré des images du film ?
Je suis allé à Ceuta quand Loïc et Jonathan étaient sur place avec Michael pour les prises de son. J’avais besoin de capter l’ambiance et d’être confronté au sujet du film. Et j’aime partager un moment avec l’équipe. Avec Michael, on a enregistré beaucoup de sons concrets surplace (grillages du Centre, portes, etc,) que j’avais pour idée dans un premier temps d’intégrer à la musique pour former une bande son assez complexe.
Comment avez-vous construit votre musique pour ce film ?
Dans un dialogue permanent avec les réalisateurs.J’ai fait des propositions, puis on a finalement éliminé, épuré, simplifié pour arriver, d’un commun accord, à la pureté et la radicalité actuelle.
Pourquoi avoir eu recours à des éléments musicaux synthétiques ?
Au départ je voulais quelque chose qui soit à contre-pied de tout ce qu’on peut imaginer comme musique stéréotypée dans le cas de figure de ce film (comme par exemple des percussions ethniques, ou des guitares acoustiques évoquant un périple).
L’option d’une musique électronique (et froide) me paraissait tomber sous le sens et ça rejoignait totalement la volonté des réalisateurs d’éviter que la musique devienne un élément émotionnel trop marqué ou mélo.
Comment s’est passée votre collaboration avec les réalisateurs ? Avaient-ils des directives entête ou est-ce vous qui avez essentiellement fait des propositions ?
Jonathan et Loïc avaient en tête quelque chose d’à la fois discret et fort. De mon côté aussi, et j’avais créé ce son de litanie électronique avec un synthétiseur mais j’avais pas mal étoffé autour. Au fur et à mesure de l’avancée du montage, on allait de plus en plus vers une simplicité musicale.Et ça faisait sens. Avec pour idée de retranscrire l’angoisse intérieure des personnages tout en n’étant pas envahissant. On est arrivés à la musique telle qu’on la connaît.
Que retenez-vous de cette expérience (humainement, professionnellement) ?
C’était tout d’abord un moment très fort d’aller à Ceuta, de voir les choses sur place. Ce dont parle le film devient tout d’un coup extrêmement tangible, concret, brut. Et c’est ce projet de film, qui est le fruit des efforts de Loïc et Jonathan, qui m’a offert la possibilité de voir une situation avec laquelle je n’aurais probablement pas été en contact hors de ce contexte. Du côté de l’équipe, les réalisateurs sont des amis, et même si ma contribution est musicale – au sein d’un projet audiovisuel qui se veut plus large – cela constitue des expériences forte de faire un tel film ensemble.
Quels sont vos projets ou sur quoi travaillez-vous en ce moment ?
Je compose et enregistre actuellement la musique de deux courts métrages de fiction ainsi que celle d’un documentaire. Dans des registres musicaux extrêmement différents.
Découvrez le site web de Wissam Hojeij: http://www.wissamhojeij.com/