Il est vrai qu’il y a de quoi perdre son monocle ou son sonotone actuellement au théâtre Marigny tant la bourrasque comique et poétique nous prend de plein fouet durant les deux heures du show. Qu’on se le dise dans A la française, Edouard Baer revisite notre patrimoine culturel… avec maestria !

Décidément, Edouard Baer n’est jamais là où on aimerait l’attendre, comme en témoigne son entrée en scène. Les premières secondes sont décisives pour construire un spectacle. Le ton y est d’emblée décalé, aérien, comique parce que d’actualité. Edouard Baer va nous parler de la France d’aujourd’hui, pas celle des médias uniquement.

Comme dans Miam Miam !, qui nous avait également régalé, l’auteur, meneur de troupe et comédien s’amuse de nos clichés de société, propose des tableaux chantés frondeurs et exploite chacune de ses pépites avec jubilation : comme Alka Balbir, la comédienne-chanteuse au physique sculptural et à la voix cristalline, comme Philippe Dequenne aussi encombrant qu’un éléphant dans un magasin de porcelaines, ou comme Leila Bekhti d’une rare énergie.

Une liberté artistique totale

Mais A la française, ce n’est pas que ça. C’est une liberté artistique totale, dans le ton, dans la forme, dans le jeu, dans l’écriture. Edouard Baer développe un peu plus dans ce spectacle son style personnel. On peut véritablement parler ici d’une œuvre « baeresque ». Elle est teintée d’un humour multidimensionnel mais rend aussi hommage en permanence au théâtre de notre bonne vieille France.

Ainsi, en plus des voix chéries de nos acteurs du cinéma enregistrées par le trublion Baer, se mêlent celles de Guitry, Cocteau, Beaumarchais. A ce dernier, Edouard Baer semble faire doublement écho : il possède son goût immodéré pour l’écriture mais aussi le contenu politique prêt à s’enflammer. Comme Beaumarchais, Edouard Baer choisit l’optimisme indécrottable face à notre temps de crise interminable et nous rappelle la célèbre réplique de Figaro : « Je m’empresse de rire de tout, de peur d’être obligé d’en pleurer. »

A la sortie du spectacle, les zygomatiques encore cuisantes, on garde en tête une expression forte, cette curieuse injonction de Baer à « rire sous les bombes », coûte que coûte. Au théâtre Marigny, pendant trois mois au moins, la crise s’annoncerait même jouable…

A la française

Un spectacle de et avec Edouard Baer

Avec en alternance : Lionel Abelanski, Alka Balbir, Leïla Bekhti, Patrick Boshart, Philippe Duquesne, Léa Drucker, Jean-Philippe Heurteaut, Atmen Kelif, Vincent Lacoste, Jean-Michel Lahmi, Guilaine Londez et Christophe Meynet

Théâtre Marigny

du 21 septembre 2012 au 29 décembre 2012

du mardi au samedi à 21h – matinée le samedi à 16h30

Location : 0 892 222 333

Site du théâtre: http://www.theatremarigny.fr/

Crédits photo: Daniel Angeli