Critique ciné « Coup de coeur » : La Fille du puisatier
Pour la première fois de sa carrière, Daniel Auteuil passe en même temps devant et derrière la caméra, en s’attaquant à La Fille du Puisatier, une oeuvre méconnue de Marcel Pagnol. Une entreprise risquée qui se révèle une vraie réussite.
Dans un champ provençal des plus ensoleillés, deux collègues déjeunent à l’ombre: il y a le puisatier (Daniel Auteuil), l’homme mûr, pudique et tendre à l’évocation de sa fille Patricia (Astrid Berges-Frisbey, la belle révélation du film) qui vient justement lui apporter son casse-croûte. Felipe, son collègue (émouvant Kad Mérad) la découvrant, en reste subjugué.
Dès les premiers plans, toute la fraîcheur, la poésie et la sourde tragédie de Pagnol sont savamment distillés. La caméra de Daniel Auteuil capte à la fois la poésie des lieux, la chaleur des relations familiales ou « collégiales » mais aussi toute la rugosité de son personnage.
Auteuil ose se réapproprier pleinement Pagnol
La Fille du Puisatier offre aussi des rôles importants à de jeunes comédiens chevronnés (Nicolas Duvauchelle toujours impeccable) ou non (Astrid Berges-Frisbey rayonnante). Cette jeune garde talentueuse est ici encadrée par des comédiens habitués aux premiers rôles (Kad Mérad, Jean-Pierre Darroussin et Sabine Azéma).
Le puisatier est ce personnage haut en couleurs (déjà interprété par Raimu) qui s’improvise mère de famille avec beaucoup de coeur et d’aveuglement aussi. Daniel Auteuil, dans une composition très charnelle et intimiste, renoue alors avec la profondeur émotionnelle de son personnage d’Ugolin dans Jean de Florette et Manon des sources.
Tout en donnant la part belle à ses partenaires. Un échange juste et poignant, un choix artistique mesuré, une belle prise de risques toutefois quant au propos du film qui souligne l’importance fondamentale des liens familiaux. Dans un monde où tout bouge trop vite, et l’individualisme va croissant, ce propos a de quoi choquer.
La Fille du Puisatier
Sortie nationale: le 27 avril 2011