Rares sont les films qui mettent en scène avec autant de réalisme l’univers hospitalier. Hippocrate, comédie sociale qui ne se prend jamais au sérieux, nous fait pénétrer dans les arcanes de cet étrange univers, par l’entremise de Benjamin (Vincent Lacoste impeccable), jeune médecin interne qui y vient effectuer son premier stage.

Thomas Lilti, réalisateur et co-scénariste sait de quoi parle son film puisqu’il lui a été inspiré de ses propres débuts de médecin interne, issu comme Benjamin, son double de fiction, d’une famille de médecins. C’est donc dans une réelle démarche de réalisme que s’inscrit Hippocrate.

A travers ce que va expérimenter ce jeune médecin tout au long de ce premier stage, c’est toute la fragilité de ce métier qui va être ici mise en exergue. Car si Benjamin est heureux d’intégrer ce service, voire fier, il va très vite déchanter.

Ou plutôt découvrir les vrais enjeux de son métier et notamment sa propre responsabilité vis-à-vis de la vie de ses patients, le manque de budget et de ressources humaines dont souffre l’hôpital, l’incompréhension mutuelle entre médecins, salariés et direction.

L’univers polychrome de l’hôpital

Mais tout n’est pas noir, loin de là, dans cet apprentissage du métier : Benjamin expérimente aussi la vie de « corpo », cette vie associative qui permet aux internes de se retrouver pour décompresser, l’amitié et même l’admiration teintée parfois de profonde jalousie pour un médecin interne plus expérimenté, incarné par le toujours charismatique Reda Kateb.

Thomas Lilti filme avec précision, révélant un univers social polychrome où l’architecture, les salles mais aussi patients et médecins évoluent selon leurs propres codes. Vincent Lacoste, qui nous a habitués jusqu’à présent aux comédies loufoques, s’en affranchit ici avec aisance bien qu’il sache toutefois aussi parfois utiliser ce don de souligner l’absurdité de certaines situations.

Face à lui, il y a Reda Kateb, très crédible dans ce personnage de médecin étranger, vivant dans la solitude, loin de sa famille, obligé ainsi de se réfugier un peu plus que ses autres congénères dans son travail (il vit même sur les lieux de son travail).

L’écriture de Lilti, comme sa caméra, révèle l’évolution psychologique de ses personnages tandis que la tension sociale au sein de l’hôpital continue de se resserrer.

Hippocrate, du nom du fameux serment prêté par les médecins, est à découvrir au cinéma pour la justesse de sa réflexion sur le métier, son humour toujours présent et son excellente interprétation (Thomas Lilti ayant même choisi d’intégrer dans son casting de vrais médecins !).