Critique théâtre: Bash de Neil LaBute
Ovni théâtral, Bash, repris au Théâtre des Mathurins, après un vrai succès au théâtre 14 en mars dernier, met en scène de la façon la plus dépouillée qu’il soit, trois récits sur la violence ordinaire, au cœur de notre société contemporaine, violence que la justice humaine n’a jamais sanctionnée et incarnée sur scène tour à tour par les comédiens Sarah Biasini et Benoît Solès. Tragique et fascinant…
« Bash » signifie à la fois « choc », « coup de poing » et « fête ».
La première chose qui frappe, c’est l’extrême dépouillement de la mise en scène. Le comédien est seul sur scène, il est assis face au public, simplement introduit par une musique (très cinématographique, au passage) et de simples éclairages prêts à accompagner l’aveu très fort qu’il s’apprête à faire au public, son unique confident.
Chaque personnage nous invite, en effet, à une mise à nu progressive et glaçante car le protagoniste principal du récit a commis un acte de violence fou, toutefois resté impuni. Voilà la raison pour laquelle nous ressortons de ce spectacle, mal à l’aise mais en même temps fascinés par la richesse de l’introspection psychologique ici proposée, ainsi que son interprétation.
Tragédie en sous-sol
Ces trois récits sont inspirés de trois sujets de tragédies, grecques ou bibliques, auxquelles le brillant dramaturge et cinéaste américain Neil LaBute, passionné par le théâtre et son histoire, rend hommage. La richesse du texte tient tant à sa construction très rythmée, à l’originalité de la situation pourtant dissimulée dans un univers quotidien très ordinaire au sein de la société américaine contemporaine, et à cette langue très imagée qui rend le discours captivant et joue avec nos projections personnelles les plus intimes.
Le tour de force des comédiens ici est d’incarner ces personnages ordinaires sur qui soudainement le destin s’abat, les poussant à commettre l’irréparable, en le jouant avec une extrême simplicité (la démarche du personnage en scène n’est-elle pas de se montrer le plus sincère possible ?), tout en révélant les sombres méandres de leurs motivations, leurs interrogations, leurs doutes et leurs souffrances.
Et c’est justement cette mise en scène toute simple qui permet la belle mise à nu de ces âmes et renforce la violence du drame, et la force des mots.
Tout en mystère, en élégance et en humour aussi, Sarah Biasini et Benoît Solès nous entraînent dans cet univers dramatique mi-théâtral, mi-cinématographique autant glacial qu’hypnotisant.
Âmes sensibles s’abstenir…
Bash de Neil LaBute Adaptation: Pierre Laville Mise en scène: Gilbert Pascal Avec Sarah Biasini et Benoît Solès Suite au succès lors de sa création au Théâtre 14 en mars et avril dernier, BASH sera joué à partir du 29 avril jusqu’à la fin juin 2014, du mardi au samedi à 19h et le dimanche à 15h30 au Théâtre des Mathurins.
Seb
Un beau succès en effet, dont la prolongement au Théâtre des Mathurins suffit à prouver. Dommage qu’il ne reste pas plus longtemps à l’affiche d’ailleurs, en espérant le retrouver aux Mathurins ou ailleurs dans les prochains mois, qui sait!