Critique théâtre : le chant des frênes
L’une des plus petites salles et non moins charmantes de Paris abrite en ce moment les amours singulières de Tourgueniev et de sa muse, la diva française Pauline Viardot (Catherine Fantou-Gournay). Et pour évoquer l’immense Tourgueniev, incarné ici par le charismatique Michael Lonsdale, Marc Zviguilsky joue au biographe en même temps qu’il signe la mise en scène de ce poignant spectacle poético-musical.
Le chant des Frênes, en référence à la propriété appartenant aux Viardot et qui abrita les amours de Tourgueniev et de la célèbre cantatrice et musicienne Pauline Viardot, se révèle avant tout une passionnante incursion dans l’histoire littéraire et musicale de ce XIX° siècle décidément bien riche du point de vue artistique.
Ces deux figures culturelles importantes de leur époque que sont Pauline Viardot et Ivan Tourgueniev se dévoilent ici grâce au prisme d’un entretien avec le biographe de Tourgueniev, reçu par le couple.
En effet, ce procédé permet de dialoguer constamment avec Tourgueniev, dans ce qu’il a de plus intime (sa relation amoureuse de quarante ans avec Pauline Viardot mais aussi ses convictions littéraires) et de montrer ce monstre de la littérature sous une forme plus humaine et forcément touchante.
Tourgueniev, âme russe et cœur français
C’est pour cela que le choix de Michael Lonsdale apparaît non seulement judicieux mais finalement capital. Qui d’autre que lui peut incarner ce monument de littérature, cette figure physique et morale si imposante, tout en distillant avec humour et générosité sa profonde sensibilité ?
Face à lui, il y a deux autres personnages importants : le biographe qui est ici une sorte de journaliste, orchestrant ce voyage dans le temps. Ne pouvant se séparer de son calepin et de ses questions souvent admiratives, sa présence constante dans cette première partie permet de familiariser le spectateur avec Tourgueniev et Viardot, de façon chronologique et documentée. Les comédiens, habiles équilibristes, jouent ici leurs personnages tout en s’accordant des pauses musicales ou de lectures d’extraits nombreuses et judicieusement choisies.
Catherine Fantou-Gournay incarne ici avec une belle conviction une Pauline Viardot à multiples facettes : diva française mondialement reconnue, pianiste et compositeur, sœur de La Malibran… Elle insuffle à son personnage une dimension artistique forte du fait de sa capacité à accompagner le spectacle par des instants au chant ou au piano.
<>A travers ce dialogue à trois voix, Le Chant des Frênes nous plonge dans un univers culturel révolu mais passionnant où l’on se rend compte combien les artistes de cette époque, toutes disciplines confondues, pouvaient beaucoup plus librement que maintenant communiquer entre eux et se soutenir d’une culture à l’autre. Ce constat est fondamental pour mieux comprendre la personnalité pluriculturelle de Tourgueniev, cette âme russe au cœur français…
Le Chant des Frênes
de Marc Zviguilsky et Catherine Fantou-Gournay
Mise en scène : Marc Zviguilsky
Chorégraphie : Nadeja L. Loujine
Avec Michael Lonsdale, Catherine Fantou-Gournay, Marc Zviguilsky
En octobre 2011
17h30: le 30
21h00: le 27, 28, 29
En novembre 2011
17h30: le 6, 13
21h00: le 1er, 2, 3, 4, 5, 8, 9, 10, 11, 12
Réservation 01 46 33 48 65
Crédits photos: Mireille Ampilhac
A découvrir également le Musée Européen de Tourgueniev
16, rue Yvan Tourgueniev
78380 Bougival
www.tourgueniev.fr