Critique théâtre: Je l’appelais Monsieur Cocteau
Reprise dès ce soir au Théâtre La Bruyère de Je l’appelais Monsieur Cocteau, une riche adaptation du livre éponyme écrit par Carole Weisweiller qui rencontra le Prince des Poètes, enfant. Bérengère Dautun, en même temps qu’elle incarne avec fougue Carole Weisweiller aux côtés de Guillaume Bienvenu (parfait en Jean Cocteau éternellement jeune et élégant), signe cette adaptation, dans une mise en scène inventive de Pascal Vitiello.
On a beaucoup parlé, écrit, représenté Jean Cocteau mais peut-être pas justement à travers le regard d’une amie fidèle qui le rencontra pour la première fois, enfant, par l’entremise de sa mère Francine Weisweiller, mécène et grande amie du poète.
Dans la villa Santo Sospir de Francine, à la pointe de Saint-Jean-Cap-Ferrat, face à la mer bleue azur, Jean Cocteau vient se ressourcer régulièrement. Carole, enfant puis adolescente l’observe fascinée. Entre eux, immédiatement une complicité se crée.
Le poète est incarné avec beaucoup d’élégance et d’humour par Guillaume Bienvenu. Il est cet éternel jeune homme, créatif, fidèle en amitié, généreux. Cette relation quasi filiale évolue. « La petite fille aux deux mains gauches » comme l’a surnommé Jean Cocteau avec affection, reste liée à ce dernier jusqu’à sa mort, alors même que sa mère Francine s’est brouillée avec le Poète.
Les décors constitués de projections, de vidéos et de jeux de lumières invitent le spectateur à voyager dans le temps mais surtout l’univers mental et géographique de Cocteau (la Villa Santo Sospir et ses fresques magnifiques et méconnues qu’il surnommait lui-même « la peau de son âme », celles de la chapelle de Villefranche-sur-mer, Milly-la-Forêt, etc.).
Ce spectacle est aussi l’occasion de rendre hommage à deux femmes qui ont véritablement compté pour Jean Cocteau : Francine et Carole Weisweiller. La première est gracieuse, charismatique voire intimidante, passionnée par les Arts et mère souvent absente ; la seconde est une enfant puis une jeune femme charmante sans le savoir, à la sensibilité artistique prononcée, profondément fidèle en amitié, subjuguée par Cocteau et ses amis (Comme on la comprend: Picasso, Marais, etc).
Bérengère Dautun nous touche à la fois dans son interprétation engagée mais aussi dans la perception très originale et tendre qu’elle défend du Poète, un être profondément tourné vers les autres, éminemment gentil (dans le sens noble du terme). C’est une pièce tout simplement poétique, drôle et sensible qui ravira les fans de Cocteau comme les fans de théâtre et de poésie (mais au fond, ne sont-ils pas les mêmes?).
Je l’appelais Monsieur Cocteau De Carole Weisweiller Adaptation de Bérengère Dautun Mise en scène de Pascal Vitiello Avec Bérengère Dautun et Guillaume Bienvenu Lumières et vidéos : Mathieu Nenny Son : Sylvain Denis Théâtre La Bruyère Les lundis et mardis à 19h Retrouvez mon entretien avec le comédien Guillaume Bienvenu réalisé en 2016 !