On entre dans la très chaleureuse salle du théâtre du Petit Saint-Martin et Camille Chamoux est déjà sur scène, écoutant ses vinyles, un mug à la main, « at home », prête à serrer la main de chacun de ses spectateurs si nécessaire. Le ton est d’emblée donné: humour incisif et tendre à la fois. L’ univers est nostalgique et volontiers frondeur…

L’humoriste démarre sa pièce avec un terrifiant constat : « Etre née sous Giscard, c’est avoir grandi sur des bases molles », c’est faire partie de cette génération X, qui a précédé la génération Y de peu, et s’est construite avec des références culturelles peu glorieuses (par exemple, les dessins animés qui foutaient le cafard comme « Clémentine la tétraplégique » qui ne (re)vivait que dans sa bulle, Rémi Sans Famille, le SDF de 8 ans, Princesse Sarah « qui a quand même connu la grande dégringolade »…).

Camille Chamoux parle donc de ce qu’elle connaît bien : cette génération dont elle fait partie, ces trentenaires qui glissent doucement vers l’âge adulte, mine de rien, avec la précarité économique ambiante, la découverte des enfants qu’il faut élever et qui ne ressemble étrangement plus à la partie de plaisir fantasmée lors de leur conception, ces dimanches passés à chiner en brocante et à ramener de quoi progressivement reconstituer l’intérieur de feux leurs grands-parents (madeleine de Proust  des souvenirs dominicaux pourtant gorgés d’ennuis)…

Frondeur et pourtant si fédérateur

Ce talent d’observatrice et d’actrice rend le spectacle particulièrement savoureux. Toutes nos petites manies sont volontiers décryptées dans des situations inénarrables qui nécessitent une sacrée énergie physique de la part de l’humoriste. Mais derrière cette écriture comique brillante, il y a aussi une réflexion souterraine plus profonde sur les paradoxes de notre société.

On sent enfin une véritable jubilation chez la comédienne à interpréter tous ces personnages, ces situations et partager ses réflexions « renversantes » qui n’hésitent pas à faire tomber de leurs piédestaux bon nombre d’artistes contemporains (même Woody Allen en aura pour son grade !), hommes politiques, blogueuses (eh oui!)  jusqu’à… notre bonne vieille Marseillaise !

Cet univers très personnel touche pourtant droit au cœur le public qui, toutes générations confondues, s’amuse et s’émeut de ce chamboulement socio-culturel que nous vivons tous ensemble actuellement.

Comme la comédie Les Gazelles que Camille Chamoux a co-écrit (et qui sortira en salles le 26 mars prochain), Née sous Giscard sait fédérer par sa forme humoristique efficace et son discours de fond autant original que pertinent.

Mais quoi, vous êtes encore entrain de lire cet article ? Foncez plutôt au théâtre ! Top, départ !…