Critique cinéma : Pupille
Le deuxième film de Jeanne Herry raconte la rencontre singulière entre Théo, 3 mois et Alice, 41 ans, résultat d’une véritable épopée humaine. Celle que représente le processus actuel d’adoption d’un « pupille » de France. Très bien documenté, ce récit n’en reste pas moins un objet cinématographique fort.
La rencontre organisée par Canal + dans ses locaux avec la réalisatrice et l’une de ses actrices fidèles, en compagnie d’associations d’aide à l’adoption a permis d’apporter un éclairage supplémentaire à ce film.
On entend beaucoup parler de l’adoption à l’international mais qu’en est-il de celle d’orphelins en France ? Beaucoup plus longue et réglementée, ce que souligne ce film à travers tous les acteurs de ce processus : de l’enfant remis à l’adoption par sa mère biologique à sa naissance à la mère aspirante (Elodie Bouchez bouleversante) qui lutte depuis plus de sept ans pour obtenir ce droit ; en passant par les assistantes sociales qui recueillent l’enfant et le placent dans une famille d’accueil provisoire, ici incarnée par un assistant social (Gilles Lellouche comme on ne l’a jamais vu), touchant dans le quotidien complexe de sa tâche.
Pour nourrir son film dont le point de départ comportait déjà en soi « une sève romanesque » indéniable, la réalisatrice a rencontré bon nombre d’associations durant deux ans. Toutes ces personnes lui ont confié toutes les difficultés, les limites mais aussi les moments de joie intense quand l’objet de leur travail quotidien portait enfin leurs fruits.
Un sujet fort, traité avec beaucoup de justesse
Autre élément important du film, malgré le sujet psychologique fort, celui-ci ne sombre jamais dans le pathos. Il explore avec subtilité l’humanité de chacun sans jamais poser de jugement.
La musique absente lors des premières images envahit progressivement l’écran à mesure que l’horizon s’éclaire. Dans la salle, les personnes représentant certaines associations d’aide à l’adoption donnent leurs avis sur le film : tous saluent le beau travail de documentation jusqu’aux dialogues « métier » et aux problématiques auxquelles ils sont confrontés au quotidien.
Sandrine Kiberlain et Olivia Côte (présente à la rencontre) incarnent des assistantes sociales avec chacune une note distincte (dans le scénario, il fallait les distinguer) : humoristique, décalée, engagée.
C’est avec beaucoup d’émotion que Jeanne Herry a porté ce film tout au long du processus d’écriture et de production. Gageons que son accouchement en salles le 5 décembre prochain se fera non dans la douleur mais bien dans l’émotion et le succès, auprès de ses premiers spectateurs que l’on souhaite nombreux au rendez-vous.
Pupille de Jeanne Herry Avec Sandrine Kiberlain, Gilles Lellouche, Olivia Côte, Elodie Bouchez... Sortie nationale le 5 décembre 2018 Un grand merci à Jean-Luc Brunet de Canal + pour l'organisation de cette rencontre.