Au pays de la « screwball comedy »
« Screwball comedy », également appelée comédie loufoque en français, tire son nom de l’argot américain dans lequel « screwball » désigne un individu au comportement étrange voire excentrique. Ce terme est lui-même dérivé du jargon du baseball dans lequel la screwball (littéralement « balle vissée » ou « balle dévissée »), appelée en français balle tire-bouchon, est une balle lancée de telle manière que sa trajectoire est imprévisible.
La comédie loufoque mêle donc des éléments du comique de situation, du comique de gestes, de la comédie romantique et de la farce.
Les limites temporelles de la comédie loufoque sont, à l’image de la définition du genre, difficiles à tracer.
Le film de Frank Capra, New York – Miami, sorti en 1934, est généralement considéré comme le premier représentant significatif de ce genre et, si son âge d’or se termine avant le milieu des années 1940, des éléments de comédie loufoque continuent d’apparaître, parfois sous la forme d’hommages ou de citations, dans des films ultérieurs. Pour expliquer son déclin, on avance notamment le fait que l’irruption de la Seconde Guerre mondiale et la fin de la Grande Dépression minèrent les codes thématiques qui faisaient la colonne vertébrale du genre, à savoir un exutoire à la misère. Par ailleurs, après la guerre, les personnages féminins du cinéma américain sont devenus un peu plus effacés, ce qui faisait justement le sel de ces comédies féministes avant l’heure.
SCREWBALL COMEDY ET SCENARISTES
Franck Capra, Billy Wilder, Charles Brackett, Robert Riskin, Jo Swerling, Ben Hecht, Charles MacArthur, Preston Sturges, Sidney Buchman, Claude Binyon, Charles MacArthur, Norman Krasna, Jules Furthman et John Lee Mahin… Plusieurs de ces scénaristes de la screwball comedy dont Capra, Sturges et Wilder, sont devenus de célèbres réalisateurs.
La Screwball Comedy a donc pu voir le jour grâce à l’alliance entre des réalisateurs tels que Howard Hawks, Frank Capra, Leo McCarey ou George Cukor et ces nouveaux scénaristes que l’apparition du son a attirés à Hollywood. Il est toutefois encore un élément qui a contribué dans une large mesure à façonner la Screwball Comedy et qu’il convient de ne pas oublier: l’entrée en vigueur, en 1934 (soit l’année même de la naissance de la Screwball) du Motion Pictures Production Code.
Il s’agit d’un code d’autocensure adopté à Hollywood, et qui vise à bannir des films l’immoralité, la vulgarité et toute représentation trop explicite de la sexualité et de la violence. Si ce code a restreint la liberté des réalisateurs, il a aussi eu des effets secondaires positifs et indirectement contribué à l’évolution de l’image de la femme au cinéma. L’héroïne typique de la Screwball se sert plus de son intelligence que de sa sensualité pour séduire.
Quelques exemples de répliques célèbres :
L’Impossible Monsieur Bébé :
David Huxley: Now, it isn’t that I don’t like you, Susan, because, after all, in moments of quiet I’m strangely drawn to you. But, well,there haven’t been any quiet moments.
New York-Miami :
Peter Warne: I want to see what love looks like when it’s triumphant! I haven’t had a good laugh in a week.
Monsieur Wilson perd la tête (I love you again)
Kay Wilson: Where did you learn to dance like this?
George Carey: By mail.
SCREWBALL COMEDIES ET MOVIE STARS |
Jean Arthur, Fred Astaire, Claudette Colbert, Clark Gable, Gary Cooper, Katherine Hepburn, Carole Lombard, Cary Grant, Irene Dunne, Barbara Stanwyck, James Stewart… Toutes ces movie stars ont participé au succès du genre de la screwball comedy, dans les années 30-40 à Hollywood. Leur sens du comique et du glamour, brillamment entremêlés a permis d’incarner ce couple dans la tourmente.
Nombreuses sont les comédies qui s’ouvrent sur une première rencontre tendue, où les deux protagonistes éprouvent de l’antipathie l’un pour l’autre. Il est également fréquent que le film commence non pas par une première rencontre, mais par une rupture. C’est le cas d’Indiscrétions, de La dame du vendredi et de Madame et ses flirts. Dans ces remarriage comedies, il s’agit pour l’un des partenaires de reconquérir son ex-conjoint et de l’empêcher d’épouser un tiers. Le principe de base reste toutefois le même: nous avons toujours affaire à un apprentissage, la crise étant nécessaire au couple de partenaires pour réaliser qu’ils sont fait l’un pour l’autre et pour (r)établir leur relation sur de bonnes bases.
INOUBLIABLE SCREWBALL COMEDY
Une combinaison de divers facteurs socio-économiques, politiques et culturels a été nécessaire à la naissance dans les années 1930. Ainsi, la Screwball reflète les changements sociaux qu’ont connus les États-Unis durant les années 1920, tels que la libération de la femme et le développement des grandes villes. De même, elle se fait l’écho d’un certain regain d’espoir que connaît le pays dès 1933, lorsque le président Roosevelt lance sa politique du New Deal, promesse pour les Américains de sortir de la crise économique.
La Dépression est donc un thème important de la Screwball et apparaît dans de nombreuses comédies (par exemple L’extravagant M. Deeds, dans lequel Gary Cooper, devenu millionnaire suite à un héritage, décide d’aider des victimes de la Crise), mais toujours traité sur un ton léger et optimiste.
La Screwball Comedy a également pu voir le jour grâce à l’alliance entre des réalisateurs tels que Howard Hawks, Frank Capra, Leo McCarey ou George Cukor et les nouveaux scénaristes comme Ben Hecht, Billy Wilder et Sydney Buchman que l’apparition du son a attiré à Hollywood.
Un autre élément de taille qui caractérise la Screwball Comedy est son humour qui allie parfaitement le slapstick, héritage du muet, avec un humour «littéraire», où la langue est d’une importance capitale. Les dialogues sont ainsi brillants et jouent un rôle central tant dans l’effet comique (jeux de mots, ironie et phrases à double sens abondent) que dans l’intrigue.
Les personnages féminins, pour la plupart, ne semblent pas être soumis à une certaine domination masculine. Les femmes sont indépendantes économiquement, par leur profession ou leur statut d’aristocrate désœuvrée. Elles ont droit au même temps de parole que leurs homologues masculins. Dans plusieurs des Screwball, le personnage féminin est clairement le moteur de l’histoire.
La Katharine Hepburn de L’impossible Monsieur Bébé est la meneuse évidente, suivie par un Cary Grant qui ne maîtrise rien, ne comprend rien, ne décide rien. Dans les screwball comedies, apparaissent en effet, des personnages masculins nouveaux, qui sont de vrais antihéros. Et pour notre plus grand bonheur de romantiques refoulés, le mariage est l’enjeu de ces comédies: un leitmotiv constant, une fatalité implacable.
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