Critique cinéma : La Douleur

C’est un film qui vous saisit à la gorge, tout simplement parce que l’écriture, la réalisation et l’interprétation suivent avec force et fidélité le filon initié par Marguerite Duras, celle qui a vécu et écrit cet étrange récit, souffrant cruellement dans l’attente du retour de son mari arrêté et déporté en 1944.

Marguerite Duras, qui s’est inspirée de son propre vécu, avait ébauché ce livre à l’époque-même de cette attente, dans ses Cahiers de la Guerre. Ce n’est qu’en 1985 qu’elle ose enfin, quelques décennies plus tard, affronter cette période pour en faire un objet littéraire.

Emmanuel Finkiel prend le parti de parler de cette époque, celle de 1944-45 mais aussi de celle des années 80. Il y a la Duras qui le vit dans toute l’atrocité de la vie quotidienne et celle qui écrit, qui observe cet autre « Je », comme seule la romancière sait le faire.

C’est cette constante distanciation qui rend le film aussi puissant. Certaines scènes en effet laissent apparaître deux femmes, l’une dans l’action et l’autre dans le détachement, ou disons, en proie à cette immense souffrance.

Il y a trois hommes qui entourent cette femme dans ce triste épisode. L’un est le mari parti mais présent à l’esprit à chaque instant de la vie de l’héroïne.

Rabier, celui avec qui Marguerite joue avec le feu, durant la première partie du film, un policier à la cheville des Allemands, qui s’attache à cette dernière sans jamais dévoiler ses réelles intentions. Benoît Magimel l’incarne avec une réelle ambiguïté, entre force retenue, charisme et sensibilité.

Le troisième homme est Dionys, l’homme de l’ombre, camarade résistant de Marguerite et amant secret qui veille en permanence sur cette dernière. Benjamin Biolay joue également les notes du mystère et de la force contenue, avec beaucoup de justesse.

Mélanie Thierry est magnifique tout au long de ce film, tant dans son jeu réaliste qu’onirique.

Une très belle œuvre.

 

La Douleur

Scénario et Réalisation : Emmanuel Finkiel

Avec Mélanie Thierry, Benoit Magimel, Benjamin Biolay, Grégoire Leprince-Ringuet…

One Comment

  • pruvost

    Merci vivement pour le partage de sensibilité et de mots !

Post A Comment