Livre – Manderley for ever
Je tenais à partager avec vous ma fascination pour la romancière anglaise Daphné du Maurier (Rebecca, Ma Cousine Rachel, Le Bouc-Emissaire, Les Oiseaux…). Manderley for ever, biographie foisonnante vient de sortir à son sujet, rédigée par Tatiana de Rosnay, aux éditions Albin Michel.
C’est un ouvrage très documenté que l’on ouvre avec délectation, l’occasion également de découvrir en photos Daphné du Maurier et ses proches. Tatiana de Rosnay, pour « infuser » son livre, expression de Daphné du Maurier (qui veut tout dire), s’est elle-même rendue sur les différents lieux de la vie de l’écrivain britannique, née à Londres en 1907, au sein d’une famille de comédiens, dont l’aïeul qui a tant fait rêver Daphné, un certain Busson du Maurier, issu de la Sarthe, s’est échappé de la France de la Révolution avec sa jeune famille pour s’installer en Angleterre.
Daphné est la numéro 2, parmi les filles chéries de Gerald du Maurier, comédien et directeur de théâtre très célèbre. C’est aussi la préférée de Gerald. Elle grandit dans l’aisance bourgeoise de son époque, rêvant à ce glorieux passé familial, à la France et à Paris qu’elle finira par découvrir à la fin de ses études.
Daphné cultive très tôt son goût pour l’écriture et l’indépendance. Elle ne se sépare jamais de son journal intime. Son voyage à Paris est pourtant déterminant. Elle y rencontre une femme, Melle Yvon, directrice de l’établissement pour jeunes filles de bonne famille, qui va bouleverser son existence. C’est une relation très forte et ambiguë qui se développe entre les deux femmes. Avec l’accord des parents de Daphné, elles vont pouvoir voyager ensemble l’été. C’est décidé, loin de sa famille, dans ce Paris enchanteur, Daphné se lance dans la rédaction de ses premières nouvelles.
Mais c’est son quatrième roman, écrit seulement à l’âge de 23 ans, Rebecca, qui va la révéler au grand public anglais mais aussi international.
Tatiana de Rosnay brosse ici le portrait d’une femme-artiste résolument moderne, dévouée entièrement à son art, au mépris parfois de sa propre vie de mère de famille. La richesse de cette biographie tient aussi dans la façon que Tatiana de Rosnay a de nous faire entrer dans l’univers intime de la femme mais aussi de l’artiste qui cultive son imagination par les voyages, les recherches en bibliothèques mais aussi en accordant une grande importance à ses propres rêves. En cela, c’est avec fascination que nous entrouvrons la porte du processus d’écriture de Daphné du Maurier.
Enfin, il y a Menabilly, « Mena », ce manoir bien caché, qui fût le lieu qui inspira Daphné pour écrire le Manderley de Rebecca. Avec beaucoup de patience, elle attendit quelques années pour louer ce manoir et y écrire ses meilleurs romans.
On frissonne d’autant plus en relisant la première phrase de Rebecca qu’on sait à présent que ce lieu n’a pas seulement existé dans l’imagination de Daphné : « La nuit dernière, j’ai rêvé que je retournais à Manderley… »
NB : Une nouvelle traduction de Rebecca vient de paraître aux éditions Albin Michel, comprenant une quarantaine de pages inédites.
Manderley for ever De Tatiana de Rosnay Editions Albin Michel – Héloïse d’Ormesson Prix : 22€ TTC.