Rencontre avec Danièle Thompson et Guillaume Canet
Paul Cézanne, Emile Zola. Une belle histoire d’amitié secrète, ressuscitée par une scénariste sensible et talentueuse, Danièle Thompson (La Grande Vadrouille, Rabbi Jacob, Fauteuil d’orchestre). Et à l’écran, deux acteurs reconnus, les « deux Guillaume », Canet et Gallienne. Une rencontre spéciale blogueurs m’a permis de rencontrer Danièle Thompson et Guillaume Canet, à l’issue de la projection.
Les dernières lignes du générique du film défilent. Difficile de s’extraire de ce film qui vient de nous plonger dans un univers artistique du XIXème siècle méconnu et palpitant. Pourtant, la rencontre qui va suivre s’annonce tout aussi riche car il s’agit ici de converser avec la réalisatrice et scénariste du film, Danièle Thompson et l’un de ses interprètes, Guillaume Canet.
Tous deux semblent heureux de participer à cet exercice. Danièle Thompson avoue porter en elle depuis déjà quinze ans ce désir de raconter cette histoire d’amitié surprenante. Mais changer d’univers de film, pour celle qui s’était jusqu’à présent autant illustrée dans le registre de la comédie, malgré déjà quelques brillantes incursions dans le drame (Ceux qui m’aiment prendront le train, La Reine Margot, entre autres), n’était guère évident.
Il a fallu le récent échec d’un film auprès du public pour ranimer l’envie chez Danièle Thompson de revenir à un projet plus personnel. Huit mois de recherches en documentation enfiévrée s’en suivent. « J’ai lu, j’ai lu, j’ai pris des tonnes de notes, j’ai noirci des tas de cahiers. J’étais complètement fascinée par tout ce que je lisais, par tout ce que j’apprenais. J’entrais dans le cœur de la vie de ces gens, dans leur jeunesse. Je découvrais des hommes en plein devenir, dans une intimité, un quotidien qui, justement n’étaient pas impressionnants. »
Encouragée par son compagnon, le producteur Albert Koski, Danièle Thompson se plonge dans l’écriture de ce qui devait ressembler à un synopsis et qui ne tarde pas à se muer en vrai scénario de film. A sa lecture, Guillaume Gallienne demande à Danièle Thompson la possibilité de jouer Cézanne, à la place de Zola.
Une approche instinctive du jeu
Quand on propose à Guillaume Canet le personnage d’Emile Zola, l’enthousiasme et la pression chez ce dernier sont à son comble. « J’avais déjà joué des personnages ayant déjà existé mais pas de le trempe de Zola », avoue-t’il en souriant. Si le comédien se plonge dans la lecture de plusieurs ouvrages en lien avec son personnage et son époque, il admet conserver une approche instinctive du jeu. « Pour chaque rôle, je me réfère à un animal-totem. Pour Zola, j’ai tout de suite pensé à un fox-terrier. » Une remarque qui surprend et amuse Danièle Thompson. Au fond, Guillaume Canet se sent proche de cet homme au « poil dru », terriblement bourru et tenace, avec un rapport à la nature très particulier. Le fait d’incarner un personnage, qui plus est un artiste, tout au long de sa vie, est un challenge que Guillaume Canet se passionne de relever. « J’observais alors mon père se lever, s’asseoir plus attentivement. Sur le plateau, dans une même journée, on pouvait jouer plusieurs âges, en fonction des scènes à tourner. C’était très excitant. »
Concernant la complicité des deux Guillaume nécessaire pour le bien de l’histoire, elle ne datait pas d’hier puisque les comédiens se connaissaient depuis le Cours Florent, ayant également participé à un court métrage puis au film Narco. « C’est sûr que cette complicité naturelle nous a beaucoup apporté dans le jeu », souligne Guillaume Canet.
La lumière des Impressionnistes ressuscitée
Avec cette histoire d’amitié presque amoureuse, très forte, qui s’étirait sur plusieurs décennies, Danièle Thompson a très vite réfléchi à la question de la photographie pour mieux l’encadrer : « je tenais à filmer la vie de tous les jours, avec de belles images contemporaines, non pas à la manière de Cézanne même si la lumière de la montagne Sainte-Victoire nous a particulièrement éblouis. La lumière s’y est révélée particulièrement joyeuse. C’était celle que les Impressionnistes révélaient alors, une peinture qui parlait enfin des gens. »
La lumière étincelante de la région d’Aix dans le film contraste avec l’univers sombre et reclus du cabinet d’Emile Zola, dans sa maison de Médan dans laquelle l’équipe du film est venue tourner certaines scènes notamment celles du jardin. « Lorsque je suis entré sur le plateau, l’arrière-petite-fille de Zola, une femme charmante qui s’occupe maintenant de la maison et du musée était là et j’ai vu dans son regard une immense surprise, comme si elle était tétanisée, comme si elle venait de voir un fantôme ! », commente Guillaume Canet, facétieux.
Une des scènes qu’il retient en particulier dans ses souvenirs de tournage est celle qui se déroule dans le bureau de Zola « où tout d’un coup Zola baisse la garde. C’était d’ailleurs une scène à la fois agréable et désagréable à tourner parce que je n’arrivais pas à contrôler l’émotion que j’avais retenue pendant tout le tournage et qui, là, me submergeait. Et j’aime beaucoup la prise que Danièle a choisie parce qu’on sent que je me bats justement contre l’émotion et c’est encore plus fort. »
Cézanne et moi En salles depuis le 21 septembre 2016 Avec Guillaume Canet, Guillaume Gallienne, Alice Pol, Déborah François,…