Nuits de la Mayenne : Rencontre avec Thibault de Montalembert

20 juin 2023. Dans un peu moins d’une demi-heure, le comédien Thibault de Montalembert va monter en scène, à l’occasion de l’inauguration du 50ème anniversaire des Nuits de la Mayenne pour une lecture du Petit Prince, accompagnée de l’Ensemble Musical de la Mayenne. Celui qui ouvre ainsi le bal des festivités, est justement né à Laval. Il me reçoit dans sa loge du charmant Théâtre des Ursulines de Château-Gontier, pour évoquer cette belle aventure, tandis qu’on s’affaire dans les coulisses…

La Mayenne, c’est d’abord la région où Thibault de Montalembert (découvert par le grand public dans la mythique série 10 pour cent) est né. « Quand on m’a proposé de participer à cette édition, j’ai été ravi parce que je connais ce festival quasiment depuis ma naissance. Les premières éditions avaient même eu lieu au Château de Lassay, qui appartenait à mon frère et maintenant à son fils. Mon frère Artus était le premier président des Nuits de la Mayenne entre 1976 et 1978. »

Jusqu’à ses 14 ans, quand sa famille a dû déménager, le comédien a grandi à Argentré, à côté de Laval. « Je ne reviens ici pas souvent mais à chaque fois, c’est avec pas mal d’émotion parce que je connais tout de ce pays, d’une certaine manière. Ses vibrations, couleurs, parfums… Les gens aussi, leur façon de parler… »

 C’est le public qui fabrique son propre film, à partir d’une histoire qu’on lui raconte.

Concernant l’exercice de la lecture publique auquel se prête ce soir-là Thibault de Montalembert, il le pratique régulièrement. « J’aime beaucoup ça. Et travailler avec des musiciens, c’est encore mieux. Enthousiaste, il ajoute. « En plus, c’est une musique composée spécialement pour cet événement et qui a été jouée seulement deux fois avant ce soir. L’aventure m’a plu. Je me suis senti plutôt honoré d’ouvrir ce 50ème anniversaire des Nuits de la Mayenne. »

Lire n’est pas un exercice anodin et encore moins le faire entendre en public. « On ne donne à voir que ce qu’on voit dans la lecture. C’est dans la mesure où vous avez un imaginaire sur le texte que le public aura accès à son propre imaginaire. S’il n’y a pas d’imaginaire, s’il y a juste les mots, rien ne se passe. C’est un exercice que j’aime beaucoup parce que dans une époque où on est saturé d’images, la lecture, c’est quelque chose qui est très reposant pour le public, quand c’est bien fait. C’est le public qui fabrique son propre film, à partir d’une histoire qu’on lui raconte ».

Pas évident de lire le chef-d’œuvre de Saint-Exupéry après l’enregistrement mythique de Gérard Philippe. Qu’à cela ne tienne, Thibault de Montalembert ne l’a surtout pas réécouté pour l’occasion. Pour bien s’emparer lui-même du texte, en faire ressortir à sa façon bien à lui, toute la poésie de ce texte universel. « Le Petit Prince, on peut le lire, le relire, on y découvrira toujours quelque chose qui sera en résonance avec ce qu’on traverse dans la vie et qui n’est pas la même chose à 20 ans, 30 ans ou à 50. Ce qui est important, ce que dit le texte, d’ailleurs, c’est ce qui n’est pas dit. C’est-à-dire les silence aussi entre les mots. »

 Tout est dans le texte. Il n’y a pas à aller chercher ailleurs mais le texte, il faut le creuser. Il faut l’interroger. 

Les silences, la respiration du texte, l’écoute, le comédien l’a également expérimenté à travers l’exercice du doublage. Il a été notamment la voix française de nombreux comédiens étrangers prestigieux. « C’est avant tout une technique. J’ai la chance de le faire avec quelqu’un qui est l’un des papes du doublage et qui dirige véritablement les comédiens. Il faut savoir qu’on double un film (qui s’est fait en deux mois de tournage), en quatre ou cinq jours, pas plus. Pour Hugh Grant, comme pour tous les comédiens que je double, c’est son rythme qu’il faut trouver, sa respiration. C’est comme un auteur en fait. Quand on lit un bon auteur, sa ponctuation est sa respiration. Et Hugh Grant, je le fais depuis tellement longtemps que quand j’y vais, c’est avec grand plaisir parce que je mets mes chaussons avec lui. Je le connais par cœur. »

Au fil des ans, Thibault de Montalembert a construit un parcours de comédien éclectique et exigeant. Parmi ses rencontres marquantes, il y a ce qu’il appelle lui-même « ses pères fondateurs » : Patrice Chéreau, Pierre Romand (directeur de l’école de Chéreau), Luc Bondy, Arnaud Desplechin. Mais qu’ont-ils justement imprimé en lui ? « Une exigence de travail. Ce rapport au texte justement, si important pour Patrice Chéreau. C’est-à-dire que tout est dans le texte. Il n’y a pas à aller chercher ailleurs mais le texte, il faut le creuser. Il faut l’interroger. Ça ne donne pas forcément tout de suite des réponses. Il y a la question aussi de l’esthétique qui n’est pas uniquement une question de décors. C’est encore une fois une manière d’aborder l’univers du poète. Comment est-ce qu’on se met à son service ? Qu’est-ce qu’on veut dire avec, raconter ? C’est très important parce que finalement, c’est ça aussi, la base. »

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Le Petit Prince, lecture-spectacle : j’étais là !

Composée spécialement pour l’inauguration de la 50ème édition des Nuits de la Mayenne, la partition de Jean-Pascal Beintus, jouée par 19 instrumentistes, s’est entremêlée, les 19 et 20 juin dernier au Théâtre des Ursulines de Château-Gontier, à la voix de Thibault de Montalembert, comédien de théâtre, cinéma et télévision pour mieux en faire ressortir toute la magie et la sève de ce conte philosophique. Ce dernier, traduit dans plus de 500 langues, fête ses 80 ans cette année.

Sous la baguette de la chef d’orchestre Chloé Meyzie et à travers l’élégant jeu de lumières, l’univers onirique ainsi créé a su illustrer à merveille la pureté du jeune héros d’Antoine de St-Exupéry et toutes les nuances des réflexions suggérées par le narrateur.

Ce jeune personnage, dans sa curiosité sans limite, son indignation parfois, comme ses brusques éclats de rire, nous reconnecte justement à notre propre enfant intérieur : celui qu’un bon livre, une bonne pièce, une véritable œuvre d’art, en somme, vient réveiller parfois.
La voix du comédien sait tour à tour narrer et incarner ces divers dialogues et personnages avec malice et sobriété.

On ne peut que souhaiter bon vent à cette lecture-spectacle de qualité !

Pour en savoir plus sur le festival 
Les Nuits de la Mayenne, 
retrouver mon article ici !

 

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